Nous sommes le 14 juillet de l'année 1969. L'Homme se prépare à marcher sur la Lune. Ce jour-là, Esther (Hélène Vincent) rêve pour sa fille Sacha (Marie Bunel), d'un mariage prestigieux, d'une vie sans histoires dans une jolie villa et d'une brillante carrière en médecine. Ce jour-là, après deux années passées à Montréal, Sacha revient en Belgique pour lui avouer qu'elle a choisi une vie radicalement différente. Par sa différence, Sacha déclenche sous le toit familial une avalanche de mises à nu drôles, pathétiques, cruelles ou absurdes. Nous sommes le 21 juillet 1969 et cette nuit, l'Homme a marché sur la Lune. Pour l'Humanité, rien n'a changé. Pour la famille de Sacha, tout a changé. Ce film est une fable. À la manière du Fabuleux destin d'Amélie Poulain. Mais Sacha n'a rien d'Amélie. C'est son destin qu'elle veut vivre. C'est pour vivre son destin qu'elle change celui des autres. Les autres, c'est sa famille. Sa mère, qui a rêvé le destin de Sacha une fois pour toutes. Elisa, sa sœur aînée (Mimie Mathy), naine adoptée et envieuse du destin que « Maman » a rêvé pour Sacha. Léa, sa grand-mère (Tsilla Chelton), qui commence à comprendre que le destin ne peut pas être celui qu'on vous fait. Et toute la différence est là : Amélie, c'est la nostalgie du destin de l'autre, qui lui ouvre son destin à elle, refoulé ; Sacha, c'est la réalité de son destin à elle, assumé, qui butte sur le destin fantasmé par sa mère. Elle ne se mariera pas, elle aime Odile. Elle n'est pas médecin, elle est photographe. Mais où sont les hommes dans tout ça ? À la conquête de la Lune évidemment. Juillet 1969 ? Si l'on en croit l'écharpe et les moufles que Sacha ne quitte pas, la date est un prétexte et c'est là que la fable commence. Papa (Christian Crahay) fait les comptes, mais il cache la faillite : c'est le destin de la réalité, rester dans l'ombre d'une balade en fusée, d'un bonheur aussi conforme qu'inaccessible. Et tout le monde reste sur sa lune à soi. Jusqu'à ce que l'Homme marche sur la Lune, jusqu'à ce que Papa danse le tango et l'illusion s'effondre. Les personnages ne peuvent communiquer. Mais des complicités se nouent autour de Sacha, à travers la recherche de réalités différentes, toujours dissimulées dans le cercle familial. Elisa cherche sa mère, la vraie. Léa attend son amant, un fuyard. Papa veut connaître les chiffres, le désastre. Mimie Mathy nous offre de bons moments quand elle le leur rend bien. Tsilla Chelton, Tatie Danièle, reste narquoise, mais gagne en gentillesse. Marie Bunel séduit quand elle doute. L'univers de la fable se déploie dans un monde de couleurs où rien n'échappe à l'esthétique sixties. Remarquée pour le scénario de Ma vie en rose (Alain Berliner, 1997) et de Tous les papas ne font pas pipi debout (téléfilm de Dominique Baron, 1998), Chris Vander Stappen excelle ici à nous promener sur une planète exclusivement féminine. Son premier long métrage donne une comédie généreuse et pleine de promesses.